Le 11 septembre continue d’attiser le discours anti-musulman 19 ans après
Une journaliste française du Figaro a associé les attentats du 11 septembre à une vidéo anodine d’une blogueuse culinaire simplement parce qu’elle portait un hijab. La publication de ce type de propos incendiaires a un double impact. Tout d’abord, cela a des conséquences sur la vie de cette bloggeuse devenue la cible d’harcèlement en ligne. Ensuite, l’impact concerne également les françaises musulmanes et les français musulmans qui continuent d’être stigmatisés et discriminés.
Afin de préparer le début de la nouvelle année universitaire, la blogueuse culinaire française Imane Boone a partagé une vidéo où elle propose des astuces pour préparer des menus pas chers pour les étudiants. Cette vidéo a été produite et partagée sur Twitter par BFMTV. Très vite après sa publication, la vidéo a été retweetée par Judith Waintraub, qui travaille au Figaro, journal orienté à droite, avec pour seul commentaire, ces deux mots : « 11 septembre ».
Le simple fait que la blogueuse porte un hijab et que cette vidéo soit postée par BFMTV le 11 septembre, ont été suffisants pour que la journaliste dessine un lien avec les attentats du 11 septembre du groupe terroriste islamiste Al-Qaïda.
En dessinant cette connexion, Judith Waintraub associe le voile ainsi que la religion de près de 5 millions de françaises et de français avec le terrorisme.
Ce type de propos a pour conséquences d’exposer les musulmanes et les musulmans aux dangers de la stigmatisation et des discriminations, et de contribuer à renforcer le stéréotype raciste et diffamatoire qui les présente comme des terroristes.
L’impact le plus visible et immédiat de ce tweet anti-musulman a été le déchainement de haine qui a visé Imane Boune sur les réseaux sociaux. La blogueuse a reçu tellement de notifications haineuses qu’elle a décidé de supprimer son compte Twitter et de faire une pause vis-à-vis des réseaux sociaux.
Le tweet de Judith Waintraub a fait s’embraser à nouveau le débat sur le voile qui polarise la France depuis quelques décennies. Alors que certaines personnes en ligne ont applaudi la remarque de la journaliste en rajoutant des commentaires à l’encontre des musulmans, d’autres ont dénoncé le caractère raciste et honteux de ce tweet.
La journaliste du Figaro est elle-même devenue une cible sur Twitter, recevant des insultes haineuses et même des menaces de mort.
La Ministre chargée de la Ville, Nadia Hai, a critiqué le tweet de Judith Waintraub le qualifiant de « triste et indigne » tout en condamnant les menaces reçues par la journaliste.
Contrairement à Nadia Hai, certaines personnalités publiques et notamment le Ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, ont défendu la journaliste sans dénoncer le caractère anti-musulman du tweet, et sans mentionner que la blogueuse avait également fait l’objet de haine en ligne.
Si la haine en ligne doit toujours être condamnée, il est également important de reconnaître qu’il y a différents types de haine en ligne. Dans un cas, une jeune femme proposant des recettes de cuisine a été attaquée du fait de ces convictions religieuses et de ses choix vestimentaires. Dans l’autre cas, une femme en position de force s’est exprimée pour renforcer un sentiment de haine envers une minorité religieuse.
L’impact des attentats du 11 septembre sur la haine envers les musulmans est largement connu et documenté. Dans les années qui ont suivi l’attentat, les crimes de haine envers les musulmans ont augmenté massivement aux Etats-Unis et en Europe. De plus, de puissants récits stigmatisants ont émergé et contribué à associer profondément Islam et violence. 19 ans après, le simple fait que la mention de cette date soit capable d’entrainer tant de stigmatisation à l’encontre d’une blogueuse parce qu’elle porte un hijab, est une preuve importante de la puissance de ces récits.